Rien que du bruit

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Rien Que Du Bruit #44
castelneau.substack.com

Rien Que Du Bruit #44

Kurt Vonnegut | Facebook | Demain, piscine ! | Une bienheureuse agitation | Inadaptation créative

Philippe Castelneau
Oct 25, 2021
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Un jour, Kurt Vonnegut prévient sa femme qu’il sort acheter une enveloppe :

« Eh bien, elle me dit, tu n’es pas un homme pauvre, que je sache ! Pourquoi n’achètes-tu pas en ligne une centaine d’enveloppes, que tu rangerais dans le placard ? Moi, je fais semblant de ne pas l’entendre, et je sors acheter cette enveloppe, parce que je sais que je vais passer un sacré bon moment tout le temps que ça va me prendre. Je rencontre un tas de gens. Je vois de magnifiques bébés. Un camion de pompiers passe dans la rue, et je leur fais signe, le pouce levé. Et je demande à une femme quel genre de chien elle promène…

La morale de cette histoire, c’est que nous sommes là, sur cette terre, pour vadrouiller. Évidemment, les ordinateurs nous empêchent de faire ça. Et ce que ne réalisent pas les gens qui fabriquent les ordinateurs — ou c’est qu’ils s’en moquent —, c’est que nous sommes des animaux dansants. Vous savez : nous adorons bouger. Et aujourd’hui, c’est comme si nous étions supposés ne plus danser du tout.

(Kurt Vonnegut interviewé en 2005 par David Brancaccio)

Photo : Kurt Vonnegut et son chien


Facebook… Hmmm… M’y voilà reviendu. Attention : je vous entends, vous tous qui riez au fond de la salle !

Facebook ? Sérieusement ? Alors ? Alors, je n’ai pas fondamentalement changé d’avis concernant les réseaux sociaux. Seulement, j’ai un livre à paraître en mars prochain (je vous en dirai plus la prochaine fois !), et Facebook est l’endroit où, semble-t-il, on vous cherche en premier sur internet.

Un ami m’a envoyé un message pour me souhaiter un bon retour “dans le grand bazar”. C’est exactement ça, Facebook, un grand bazar, dont il faut se jouer et jouer avec (et ne pas oublier de sortir de temps en temps s’acheter une enveloppe, hein !)


Demain, vous faites quoi ? Un petit twist autour de La Piscine, ça vous tente ? Dans les toutes prochaines semaines sortira le hors série de la revue La Piscine ayant pour thème « demain ». Les contributions reçues ont été nombreuses (plus de 400 !) et de qualité. Avec Alain, Christophe et Louise, nous n’avons pas ménagé notre peine pour vous proposer un sommaire varié et riche, dont vous trouverez un avant-goût ici.


(…) si je n’écris pas, je ne suis pas heureux. Mais, la plupart du temps, ce que j’écris n’est pas à la hauteur de mes attentes non plus, et écrire ce que j’écris m’insatisfait plus encore que si je n’avais rien écrit, raison pour laquelle j’en viens parfois à me réfugier dans une non-écriture qui, si elle ne m’apporte rien, au moins ne m’enlève rien. C’est un bon compromis, et en même temps c’est un très mauvais compromis. Il m’abaisse.

— Guillaume Vissac (journal d’août)

J’éprouve parfois un sentiment de vacuité affligeant, comme si toute cette énergie que je dépense sur mes textes était dilapidée pour rien. J’éprouve rarement ce sentiment quand je travaille, parce que le plaisir m’emporte, mais quand un projet se referme je me demande toujours à quoi bon. (...)

Mais en fin de projet, quand le laboureur est fatigué, il lui est difficile de penser au champ suivant. Je ne le vois même pas. J’ai l’impression qu’il n’existe pas, que je suis arrivé au bout d’un chemin sans issue.

— Thierry Crouzet (journal de juillet)

Toute personne qui crée est en proie au doute et à l’insatisfaction. Mais peu importe : « tu n’as pas besoin de croire en toi ou en ton travail. Tu dois rester l’esprit ouvert et conscient des pulsions qui te motivent. Garde le canal ouvert », nous dit la chorégraphe Martha Graham.

Dans le livre que lui a consacré Agnes de Mille, Martha : The Life and Work of Martha Graham, elle poursuit :

Il y a une force vitale, une énergie, une accélération qui se traduit à travers toi en action, et parce qu’il n’y aura jamais, de tout temps, qu’un seul toi, cette expression est unique. Et si tu la bloques, elle sera perdue définitivement (…) Le monde ne l’aura pas. Ce n’est pas à toi de déterminer à quel point ce que tu fais est bon, ni sa valeur, ni comment cela se compare à d’autres expressions.

(…) Aucun artiste n’est heureux de son travail. Il n’y a qu’une étrange insatisfaction divine, une bienheureuse agitation qui nous maintient en marche et nous rend plus vivants que les autres.

Austin Kleon, à qui j’emprunte ces extraits du livre d’Agnes de Mille, a une très belle formule pour résumer tout ça : l’inadaptation créative.

Aussi, maintenant que mon livre est terminé, que nous en sommes aux ultimes corrections, qu’il sera présenté aux représentants d’Harmonia Mundi début décembre, en janvier aux libraires et sur leurs tables le 3 mars prochain, il ne me plus qu’à retourner cultiver mon inadaptation créative !

(et en attendant ma prochaine lettre, vous pouvez également lire mes derniers billets sur mon site !)

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